Interview

MASS HYSTERIA (2018) - Fred Duquesne (Guitare)

Trois ans après le très réussi « Matière Noire », Mass Hysteria revient avec un disque tout autant abouti, « Maniac ». Un album lourd et puissant, peut être le plus heavy de toute l'histoire du groupe. Rencontre à Paris avec leur guitariste et producteur, Fred Duquesne.

« Ce nouvel album sort six ans après « L'armée des Ombres », trois après « Matière Noire ». Un disque tous les trois ans, c'est devenu votre rythme de croisière. »


« C'est un rythme qui s'installe naturellement. On tourne sur deux années après un album puis l'on se donne un an de créativité. C'est un rythme qui nous va bien. »

« Matière Noire » a été un disque qui s'est bien vendu et a eu un grand succès critique. Il a été l'album du grand retour de Mass après un creux. »

« Le creux est plus vieux que cela. On l'a eu au moment de l'album noir. C'était un moment difficile dans l'industrie musicale. Nous étions sur une major Sony pour les albums précédents puis avons fait cet album sur un label indé.Ce n'est pas notre meilleur album. Depuis ce disque, nous avons remonté la pente avec Failles, l'Armée des Ombres, Matière Noire et Maniac aujourd'hui. Vendre des disques, surtout pour un groupe metal comme nous ce n'est pas évident. »

« Maniac » sort aujourd'hui. Il n'a été précédé d'aucune vidéo, d'aucun single. Vous avez joué sur le mystére par rapport à sa sortie. »

« Oui, il faut créer un certain mystère. Je ne comprends pas les groupes qui sortent quasiment tous les titres d'un disque avant qu'il ne sorte. Quand j'étais gosse, j'attendais la grand messe du prochain AC/DC avec impatience. C'est excitant. »

« La réussite de Matière Noire » vous-a-t-elle mis une quelconque pression lorsque vous avez commencé à enregistrer « Maniac ».

« La réussite de « Matière Noire » aura pu avoir comme conséquence que l'on fasse ensuite un album mainstream avec des hits comme l'aurait fait un groupe américain. Nous, au contraire on a eu envie de faire un album sans compromis. Nous sommes fans de Slayer qui n'a jamais rien changé dans sa musique. Si notre album plait, tant mieux, s'il ne plait pas, tant pis. Si Mass est encore là c'est grâce à vos médias et au public. C'est le public qui nous fait exister. On ne passe pas en télé ni à la radio. Le metal ne passe nul part en France alors que le Hellfest est le plus gros festival de l'Hexagone, que c'est le genre musical le plus écouté en streaming. »

« Vous avez toujours chanté en français. Pourquoi ? »

« Mouss n'est pas un chanteur metal classique. C'est la force du groupe. Le dernier morceau de l'album est en anglais mais c'est une simple phrase. Ce n'est pas vraiment du chant. »

« Il y a encore une fois dans le nouvel album, ce côté indus qui vous caractèrise. »

« Oui, mais c'est aussi le disque le plus metal que l'on ait fait. Il y a des synthés mais pas de beats électroniques. Il y a moins de samples sur ce disque que d'ordinaire. »

« Cétait évident que tu sois encore une fois le producteur du disque ? »

« Il y a une facilité à fonctionner comme ça. J'essaie de progresser au niveau de la production. C'était une évidence de le faire ainsi. Avec moi à la production, on a tout le temps que l'on veut devant nous. Avoir du temps pour produire un disque c'est ausi la clé de la réussite de celui-ci. »

« Ton travail en tant que producteur de No One ou Ultra Vomit influence-t-il ton travail de producteur pour Mass ? »

« Entre le son d'Ultra Vomit, celui de No One ou celui de Mass il y a des différences. Je n'utilise pas les mêmes choses d'un groupe à l'autre mais des choses que je vais utiliser pour un groupe peuvent avoir une influence sur la façon dont je travaillerai avec un autre. »

« Vous êtes là depuis 25 ans. Qu'est-ce qui vous motive ? Les tournées ? »

« Les tournées peuvent te donner envie d'arrêter, parfois. C'est crevant une tournée. En fait, on ne sait faire que ça. C'est une passion. Cela fait vingt cinq ans que ça dure mais il y a plein de vieilles enseignes qui le font. Pourquoi cela ne serait-il pas possible en France ? »

« Les groupes souvent s'assagissent avec l'âge. Vous, c'est le contraire. »

« Comme je te disais tout à l'heure, Slayer n'a jamais bougé. On avait la rage pour cet album. Quand on se retrouve, c'est un peu comme des potes qui se retrouvent pour jouer au foot. »

« Les textes de cet album sont plus intimes que sur les autres albums »

« C'était voulu. Mouss en avait un peu marre de la politique. Il ne sait plus pour qui voter et je le comprends. La première date de la tournée « Matière Noire » était le soir même des attentats du Bataclan. Le titre « L'enfer des dieux » a été concomittant aux attentats alors que l'on avait écrit le morceau avant. C'est presque devenu un morceau référence par rapport aux attentats. A chaque fois qu'on le jouait, les gens réagissaient à fond. On a eu envie de tourner une page par rapport à cela. On a voulu sur ce disque parler d'amour, de choses un peu tristes. »

« Ceci dit l'intime peut être engagé. »

« Exactement. »

« Les morceaux de l'album sont assez courts. »

« C'est pas plus mal. Nos morceaux dépassent rarement les quatre minutes.On les pense par rapport aux live. On imagine les morceaux comme des coups de poing. »

« Quelle est la signification du titre de l'album « Maniac » ?

« Mouss le pensait comme Ma Niaque. C'est court, c'est efficace. »

« La pochette est assez trash. »

« C'est un clin d'oeil à « Contraddiction » qui a été un album important pour le groupe. Il y a une esthétique chic et violente qui correspond bien à nos démons. »

« Contraddiction » est devenu disque d'or cette année. C'est une fierté pour le groupe ? »

« Tu mets dix neuf ans en France pour être disque d'or. Tu imagines comme c'est dur. Un groupe peut l'être en une semaine, nous il aura fallu dix neuf ans. C'est beau en même temps. »

« La tournée qui suit la sortie de l'album est énorme. »

« La tournée « Matière Noire » l'avait déjà été avec 110 dates. On commence par une release party à Reims ce soir. On trouvait ça sympa de jouer l'album le jour de sa sortie. On jouera l'album puis dans une seconde partie, on fera une sorte de best-of. On va commencer par les clubs pour finir par le Zénith en décembre 2019 pour être dans un truc progressif. »

« Vous avez sorti un live au Trianon. C'était pour les fans ? »

« Oui mais pas seulement. Ce devrait être interdit les live pourris filmés au portable sur Youtube. On a envie de laisser une trace de ce que l'on a fait dans notre vie. »

« Vous êtes à l'affiche du prochain Hellfest. Cela vous a fait plaisir d'être annoncé dès la fin de l'édition de cette année ? »

« Ce sera notre quatrième Hellfest. On va faire un prime-time. Cela nous donne une pression supplémentaire par rapport au fait de jouer à midi ou à quinze heures. C'est un très grand plaisir. »
 
Critique : Pierre Arnaud
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