Interview

YAROTZ (2022) - Fabien (Guitare / Chant)

« Erinyes » premier album de Yarotz est un superbe disque qui mélange avec brio noie, punk hard-core et post-metal. Entretien avec le fort sympathique et très intéressant Fabien, chanteur guitariste du groupe.

« Yarotz est né en même temps que Junon dans lequel plusieurs membres du groupe jouent également. Qu’est-ce qui distingue les deux groupes ? »


« Yarotz est né après le split de General Lee. J’ai eu envie à ce moment-là de reformer un groupe. J’ai toujours écouté des trucs plus extrêmes que les autres membres de Junon et je voulais un truc assez extrême. Dans la chronologie des événements, Yarotz est même né avant Junon. »

« Et les prémisses de Yarotz c’était The Third Eye. »

« C’est cela. On se cherchait musicalement. La stabilité est arrivée à partir de début 2020 avec l’objectif d’enregistrer au printemps 2020. A ce moment là est apparu le Covid. On a commencé à bosser ensemble à cette époque. On a pris notre temps. On s’est posé pour la compo puis on a enregistré une demo avec The Third Eye. On a voulu faire un truc un poil un peu plus punk hard-core que ce que l’on faisait avec The Third Eye. Le nom du groupe ne nous satisfaisait pas complétement et on voulait un nom plus court. Pour toutes ces raisons The Third Eye est devenu Yarotz. »

« Le début du disque sonne assez noise. »

« C’est un genre qu’on aime. Il y a cette approche dans le son, un son à la Unsane. Nous n’avons pas de guitares saturées comme dans le metal. Après, on est plus rapide dans les tempo que la musique noise ne l’est en général. On cherche à avoir un son riche et dense. »

« Après ce début noise l’album s’aventure vers un terrain plus post-metal. Vous semblez avoir des influences musicales super variées. »

« Je n’ai aucun frein au niveau de la création. On écoute tous les trois dans le groupe des trucs très variés qui vont de la folk au grind-core. On fait des morceaux qui nous plaisent. On a pour ambition de casser les codes car nous n’avons pas envie d’étiquette, seul l’énergie et l’émotion importent. »

« Il y a plein de cassures de rythme dans le disque. »

« Oui parce que j’aime la dynamique. C’est quelque chose qui me tient à cœur. Le but c’est quand même que l’auditeur ne se fasse pas chier. Il y a ainsi dans le disque des éléments noise, post-metal mais aussi post-rock. J’aime beaucoup un groupe comme Godspeed You !Black Emperor, par exemple. »

« Vos influences ce sont des groupes comme Converge, Russian Circles ? »

« Converge cela a été l’une des plus grosses claques de ma vie. C’est un groupe qui fait partie de notre ADN. J’aime aussi beaucoup Dillinger Escape Plan ou Chelsea Wolfe. Russian Circles j’aime beaucoup également, effectivement. »

« Les textes de l’album sont assez engagés. »

« On vit une période anxiogène et l’écriture fait du bien. Je pars de constats personnels. Je veux pointer du doigt certaines choses mais je ne suis pas donneur de leçons pour autant. »

« Un titre comme « Vergogna » parle de l’état de la planète ? »

« Tout à fait. J’ai voulu exprimer un ressenti personnel. J’ai deux enfants. Quand j’ai fait le second je me suis dit que c’était une envie égoïste par rapport à l’état de la planète que j’allais lui laisser. On offre à nos enfants un monde déplorable. Je me suis rendu compte plus tard dans une vision plus optimiste que nos enfants sont la solution, qu’ils peuvent changer les choses. »

« C’est pour cet engagement envers la planète que tu es végétarien. »

« Je le suis depuis quinze ans maintenant. J’ai pensé à comment changer les choses dans la vie de tous les jours pour faire bouger certaines choses. Les nouvelles générations ont compris la souffrance animale et c’est une bonne chose. »

« C’est cette proximité idéologique sur l’écologie qui fait que Christian Andreu de Gojira joue sur « Childish Anger » ?

« Je suis proche de Christian. On échange pas mal de messages. Gojira a soutenu assez rapidement Sea Shepherd. Moi aussi. Il y a plein de combats à mener. Je l’ai sollicité bien avant l’enregistrement de l’album. Il avait un planning ultra chargé mais il a pris à cœur de participer à ce morceau. J’aime beaucoup Christian. C’est quelqu’un de très humble. »

« C’est un titre qui parle de frustration ? »

« Oui sur celle que l’on peut ressentir dans la vie. Celle, par exemple, de se sentir écoeuré par l’exploitation des africains dans les mines afin qu’ils nous fournissent la matière qui composera nos i-phone. »

« Impunity » est un morceau qui parle de l’affaire Matzneff ? »

« Cela me donne de l’urticaire cette histoire. C’est un truc de dingue. Tout le monde savait qu’il était pédophile et personne n’a rien fait. C’est de l’impunité totale. Pourquoi un homme parce qu’il est écrivain pourrait-être pédophile sans que cela ne choque qui que ce soit ? Il y a une certaine impunité dans les milieux culturels et politiques qui me dérange. »

« Qui a fait la très belle pochette du disque ? »

« Une artiste japonaise, Yuki Watanabe. J’ai aimé son univers froid et morbide. Elle joue aussi dans un groupe. On a voulu montrer un certain monde végétal avec cette pochette. En Europe les chrysanthèmes sont symboles de mort mais au Japon celles-ci représentent au contraire la lumière. La pochette évoque également une déesse vengeresse grec qui, dans la mythologie romaine sont les furies et dans la mythologie égyptienne symbolise la psychostasie lorsque le défunt est soumis au tribunal du jugement d’Osiris. »

« Vous avez sorti le disque en auto-production. »

« Oui on a été en contact avec un label allemand puis on a finalement décidé de le faire en auto-production. C’est un investissement perso mais on fonce. »

« Vous avez des concerts à venir ? »

« Oui on a plusieurs concerts en Avril. On jouera aussi à Biarritz le 14 mai et au Hellfest le 24 Juin sur la scène Altar, ce qui est vraiment cool. »
 
Critique : Pierre Arnaud
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