Interview

IMPERIUM DEKADENZ (2023) - Horaz (Chant / Guitare / Clavier)

Près de vingt ans après sa formation Imperium Dekadenz reste aujourd’hui encore un excellent groupe. Quatre ans après « When We are Forgotten » le duo nous revient avec un splendide « Into Sorrow Evermore ». Un disque de black atmosphérique de très haut niveau. Entretien avec le fort sympathique Horaz (chant, guitare, claviers).

« Quelle était votre intention avec le nouvel album comparé à ce que vous aviez fait pour « When we are forgotten » ?


« Pour ce nouvel opus nous nous sommes concentrés sur les parties mélancoliques. Cela a toujours fait partie de notre ADN cette mélancolie mais nous avons encore insisté davantage sur cet aspect. Nous avons supprimé les interludes qu’il y avait dans le disque précédent. Nous sommes revenus à nos racines black metal, le black metal norvégien des 90’s. »

« Tu parles de groupes comme Mayhem, Emperor, Darkthrone ? »

« Oui, surtout Darkthrone, Satyricon. Tout à fait. »

« Le disque est à la fois très black et très mélancolique. »

« Oui comme je te disais la mélancolie a toujours été importante pour nous. Il y a certains titres du nouvel album qui le sont profondément. »

« Certains morceaux sont très longs mais vous avez aussi des titres plus courts que d’ordinaire, des morceaux qui n’excèdent pas cinq minutes. »

« Oui nous avons souvent fait des titres de neuf, douze minutes dans le passé. Là aussi c’est une différence que d’avoir composé des morceaux qui n’excèdent pas les cinq minutes. »

« Vous avez dit que la pandémie n’avait pas changé votre façon de penser ou d’être mais est-ce que celle-ci a quand même eu une influence sur le disque ? »

« Cela a peut-être changé des choses pour le disque effectivement. Nous avons tous les deux des boulots en dehors du groupe. Au moment de la pandémie il y a eu le lockdown donc nous avons eu plus de temps pour préparer le disque, du temps, pour le song-writing notamment. Nous avons écrit vingt morceaux, en avons conservé huit. Ce ne sont peut-être pas les meilleurs morceaux mais ceux qui forment la plus grande cohérence possible entre eux. La pandémie n’a en effet pas eu d’effets négatifs sur ma vie personnelle. Cela a été un moment plutôt heureux pour moi. »

« Vous êtes un duo. N’est-ce pas la meilleure formule pour un groupe ? »

« C’est sans doute la meilleure solution, en effet. Si tu es seul il n’y aura personne pour se confronter à tes idées. A cinq chacun aura sa petite musique personnelle et tu auras trop de points de vue différents. En plus un membre du groupe sera black metal, l’autre post-metal et le bassiste voudra faire du Mötorhead. Plus il y a de membres dans un groupe et plus il y a d’egos. »

« Vous n’avez pas de gros egos ? »

« Nous avons des egos bien sûr mais nous sommes avant tout des amis. Nous nous connaissons depuis vingt ans maintenant. Nous ne sommes pas dans une compétition sur qui écrira le plus de titres, qui en fera le plus pour le groupe. »

« Vous jouez tous les deux du synthé et de la guitare. Comment procédez-vous pour le groupe ? »

« On échange les idées. En fait c’est un peu comme si nous étions deux solos projects qui se complètent. »

« L’album parle beaucoup des ténèbres. »

« Nous parlons de la façon de se confronter aux ténèbres, de les découvrir. « Truth Under Stars » parle de se promener dans la foret la nuit et de la façon dont tu peux voir l’univers à ce moment-là. De jour tu n’auras pas la même perception de l’univers. Tu peux découvrir tant de choses la nuit. Plein de gens ont peur des ténèbres alors que tu peux y trouver tant de beautés. Peut-être ont-ils peur de trouver des choses à l’intérieur de leur âme. »

« Est-ce que cela signifie que tu n’aimes pas le jour ? »

« Non pas du tout. Pour te raconter une anecdote, un jour j’ai mis un morceau dans ma voiture à mes collègues de boulot : un titre de black metal dépressif. Ceux-ci se sont mis à rire en disant il y a quelque chose de cassé dans ta stéréo puis ils se sont tus et un silence s’est installé car cela les rendait nerveux. Les gens, en général, sont mal à l’aise avec ce qui est sombre. »

« Est-ce en fouillant dans les ténèbres que vous réussissez à créer une musique aussi émotionnelle ? »

« Oui même si nous ne sommes pas pour autant un groupe de black metal dépressif. Nous parlons de plein de choses, de la beauté de la nature notamment. Nous avons essayé d’écrire un album qui soit comme une journée. Ce n’est pas le genre de disque que tu vas écouter en fond sonore. Il faut plonger complètement dedans pour l’apprécier à sa juste mesure. »

« C’est votre deuxième album chez Napalm. J’imagine que ce label vous fait grandir ? »

« Nous étions chez Season of Mist-Underground Activists auparavant. Les gens de Season of Mist ont fait du super boulot. Nous avons sorti trois albums chez eux. Napalm est le plus gros label indépendant en metal. Dans le passé nous faisions vingt interviews au moment de la sortie de nos albums. Pour celui-ci nous en sommes déjà à quarante. Nous grandissons avec Napalm, c’est vrai. »

« Vous avez grandi au fur et à mesure de votre carrière d’ailleurs. »

« Tout à fait. Nos premiers albums étaient sur un petit label underground. »

« L’an prochain sera le vingtième anniversaire du groupe. Vous allez célébrer cela d’une manière ou d’une autre ? »

« Du fait que nous avons tous deux des boulots il nous est difficile de partir pour de longues tournées mais l’an prochain nous espérons rejouer en France, en Italie, en République Tchèque, pays où nous n’avons joué que deux, trois fois. »

« Il y a des dates de prévus déjà ? »

« Oui même si c’est de plus en plus difficile de booker des shows. Les gens n’achètent plus les billets à l’avance. C’est de plus en plus dur. »

« Vous avez déjà eu de supers bons retours pour votre disque. J’imagine que cela vous fait plaisir ?»

« Absolument. Nous sommes contents car les critiques ont vraiment écouté le disque. C’est un album qui fourmille de détails et le fait que les critiques aient capté cela nous touche. »

« Qu’écoutes-tu comme musique en ce moment ? »

« Beaucoup de black metal underground. J’aime bien Sorry en ce moment. Mais nous n’écoutons pas que du black. Nous sommes fans de Dead Can Dance, écoutons de la musique électronique. On aime plein de genres musicaux différents. Tant que c’est sombre cela nous va. »
 
Critique : Pierre Arnaud
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