Live Report

MOTOCULTOR FEST (2022) - JOUR 2 - 19/8/2022

 
La journée du vendredi s’amorce avec Aephanemer sur la scène principale. Dès le tout premier concert du jour je suis déjà aux anges, vu que je les attendais de pied ferme (enfin façon de parler, plutôt avec une patte folle vu que je me suis foulé une cheville la veille en me rendant à la Supositor Stage – le fossé de 20 centimètres sur un terrain accidenté dans une zone pas du tout éclairée le soir, c’est dangereux) depuis le Kave Fest tout début juillet, autant dire que je ne comptais certainement pas arriver en retard ! Aephanemer est un quatuor de symphonic melodic death metal toulousain, mais dont le succès rayonne de plus en plus à l'international. Martin le guitariste lead et compositeur du groupe étant toujours en rééducation pour sa dystonie c'est Sylvestre d'Iron Flesh qui le remplace sur ce concert également. Ils ouvrent leur set avec le titre "Antigone", et déroulent une playlist bien équilibrée entre des titres issus de "A Dream of Wilderness" ("Le Radeau de la Méduse" en français par exemple) et les albums précédents, comme "Bloodline" et "The Sovereign". La performance est énergique et incarnée, l'alternance entre growl et petits passages au chant clair de Marion est très bien maîtrisée, Lucie est solaire et virevoltante, parcourant toute la scène, la batterie de Mickaël, inflexible, rythme le tout, Sylvestre se débrouille très bien à la guitare lead pour interpréter des compositions rapides et sophistiquées. J’ai enchaîné le concert avec une interview du groupe, qu’il sera possible de lire prochainement sur le site.

En sortant de l’espace presse je suis allée voir Acyl, le deuxième groupe déjà vu au Kave Fest que j'ai le plaisir de revoir, avec un set similaire également, à l’instar d’Aephanemer. On peut dire que le concert d’Acyl était dansant, positif, rejoignant le message inclusif et tolérant prôné par le chanteur. La musique metal mélangée aux instruments traditionnels kabyles fonctionne à merveille et les membres du groupe diffusent vraiment leur bonne humeur, les guitares, la basse, la batterie répondent aux percus, ils font plaisir à voir et forment un groupe qui semble soudé. Si je ne m'étais pas fait une entorse la veille j'aurais volontiers dansé plus que les quelques pas hésitants que j'ai esquissés !

On enchaîne sur la Massey Ferguscène avec Klone, du post-rock ou metal / rock progressif, incarné par cinq musiciens français, originaires de Poitiers. Autant j’aime la musique du groupe sur album habituellement, autant là j’ai davantage de mal à m’immerger vraiment dans le concert. Peut-être parce que le fait de jouer en pleine journée ne colle pas totalement avec l’ambiance mystérieuse et planante que leur musique dégage.

Ensuite j’ai découvert sur scène un groupe dont la présentation m’avait intriguée, The Shamisenists. Il s’agit d’un trio de musiciens japonais mêlant allègrement metal et musique traditionnelle japonaise, avec des touches de rock progressif, de jazz et de funk, composé d’un batteur, d’un chanteur au shamisen et d’un autre musicien au shamisen basse. Le combo est très inhabituel, et pour le moins dépaysant. Le shamisen est un instrument à trois cordes traditionnel japonais, et on est certainement déjà assez peu à connaître en France, alors là, la version électrique du shamisen, c’était encore le palier au-dessus ! Les trois musiciens avaient une attitude très sympathique, vraisemblablement ravis d’être là, et le chanteur nous a même interprété une chanson en français. Si vous aimez les groupes qui mélangent metal et musique traditionnelle de façon originale et inédite, n’hésitez pas à écouter The Shamisenists !

L’après-midi se poursuit et il est l’heure de la messe noire sur la Supositor Stage avec les lyonnais de Seth. Au programme, du black metal avec beaucoup de mise en scène, des postures grandiloquentes, des costumes très travaillés, des paroles sombres en français et une ambiance de messe satanique et rituelle. Le show est toujours assuré avec Seth, on peut s’attendre à en prendre plein les yeux et les oreilles, avec au passage leur incontournable prestation sanguinolente réalisée avec la complicité de la performeuse burlesque et modèle Melainya B pour un show sensuel plein d’hémoglobine, de flammes et de références vampiriques. On a été plusieurs à déplorer la qualité du son pas forcément très qualitative, empêchant une bonne compréhension des paroles. Cela avait déjà été le cas au Petit Bain quelques mois plus tôt, ce qui est un peu frustrant pour un groupe comme Seth qui a un son ultra propre sur album.

Sur la scène principale on reste dans le sombre et les ambiances pleines de sombres créatures avec The Great Old Ones. C’est parti pour une bonne tranche post-rock / black intense mais relativement lent, lourd, extrêmement pesant. Tout le groupe est vêtu de noir et encapuchonné, mais les décors scéniques tarabiscotés viennent agrémenter un peu l’aspect visuel, de même que le côté sombre et solennel des chansons est contrebalancé par des lumières assez colorées et contrastées. Ce qui est plutôt adapté pour narrer des contes lovecraftiens horrifiques mais chatoyants.

Changement d’ambiance avec Krisiun sur la Supositor Stage, pour du thrash death. Le groupe est un trio originaire du brésil, formé par trois frères, un chanteur guitariste, un bassiste et un batteur. Le concert est très bourrin, évidemment ça a lancé toute une série de slams, pogos, circle pits, le public est à fond. Ce n’est clairement pas mon style de musique mais c'est sympa à regarder car ça fait toujours bouger tout le monde, et l’attitude badass du trio est plaisante, cela reste un bon moment.

Direction un tout autre univers musical avec Skald sur la nouvelle et plus petite scène, baptisée Bruce Dickinsène. Bien que plutôt consommatrice de folk je pensais ne pas aimer plus que ça Skald, trouver leur musique un peu lisse et redondante, et en fait là c'est rythmé, habité, les six membres du groupe (chanteuse + percus, percussionniste + choriste, différentes percus et instruments à cordes, tout le monde chantant un peu par moments) forment une troupe vraiment expressive, avec un aspect assez théâtral, spectacle vivant, on se laisse embarquer et conter des histoires du nord (je ne parle pas de Lille hein, un peu plus au nord). Une bonne partie du line up a vraisemblablement changé, et je trouve les membres actuels vraiment convaincants, entonnant des hymnes nordiques et pagan. Même si les musiciens de Skald ont été programmés sur la plus petite scène, je crois que c'est pour l'instant le concert qui a rassemblé le plus de monde, la foule s'étend jusqu'au milieu du site, et c’est mérité.

Retour devant la Dave Mustage pour The Ocean, anciennement The Ocean Collective, du metal progressif et post-rock allemand aux compositions incroyables, à la fois entraînantes, mélancoliques et virulentes. Le chanteur, les deux guitaristes, le bassiste, le batteur et le claviériste nous font vivre une belle expérience musicale, dans une alternance de lumières psychédéliques, de contre-jour et de stroboscopes, avec des passages doux et d'autres bien plus énervés, le tout saupoudré de musiciens énergiques qui sautent partout. Le chanteur a dit qu'on était beaux, qu'il nous aimait, faisait des petits cœurs avec les doigts, bref The Ocean c'est de l'amour

Après siii longtemps Tarja peut enfin faire sa tournée pour la sortie de son album "In the Raw", sorti en août 2019 ! Et elle est bel et bien en robe dorée, comme elle m'en avait parlé en enthousiasme en interview, à l’époque sans se douter que ses projets de tenues et de décors scéniques ne seraient pas voués à se réaliser dans un futur trop proche… Tarja impressionne par son côté solaire, elle est super pêchue et souriante, en forme, radieuse, entourée de musiciens doués et charismatiques. Les lumières sont magnifiques, les tenues très belles aussi, le son est excellent (franchement c’est certainement la nouvelle et plus petite scène qui s’en sort souvent le mieux niveau son), je savoure vraiment le concert, et le plaisir de voir enfin chanter cette artiste qu’on ne présente plus. La voix de Tarja est toujours puissante et juste, c’est un régal d’écouter la soprano sans son registre heavy metal et chant lyrique.

J'ai décidé de ne pas shooter Leprous bien que j'aime beaucoup ce groupe car je l'ai déjà shooté deux fois, donc j’en profite pour faire une vraie pause repas, d'autant qu'avec mon entorse il faut que je me ménage un peu, et pour me placer pour Powerwolf sur le créneau suivant, eh oui comme il y a trop de photographes pour la contenance du pit on commence à devoir faire la queue comme au Hellfest et jouer la stratégie. J’avais déjà vu une fois Powerwolf en salle donc je savais que je pouvais m’attendre à un show magistral, surtout sur la scène principale, propice aux backdrops démesurés et aux éléments décoratifs de toutes sortes. Et je ne suis pas déçue, tout est mis en place par le groupe de power metal allemande pour faire vivre une « messe heavy metal » au public, avec des drapeaux, des encensoirs, des costumes et maquillages dans des dégradés de gris du plus bel effet. Le chanteur Attila Dorn en bon leader charismatique s’adresse souvent au public entre les chansons, en français s’il vous plaît, et ce en s’excusant plusieurs fois de mal parler notre langue, alors qu’il se débrouille très bien. Il nous appelle « mes amis », nous enjoint à chanter avec lui, à faire monter encore plus l’ambiance, qui est déjà au top sous le chapiteau. Les guitaristes courent partout, montent sur les baffles, c’est vraiment le genre de scénographie où l’on sait à peine où donner de la tête tant il se passe des choses dans tous les coins. Attila Dorn nous a gratifiés d’une version française de « La Bête du Gévaudan », ça fait toujours plaisir – même si je l’ai gardée en tête pendant 10 jours, et qu’en écrivant ce live report je sens que c’est reparti pour un tour !

Après la claque powerwolfesque je pars regarder Celeste, même si je suis venue sans Babar, et là après la débauche de moyens des allemands c’est une tout autre ambiance que le groupe lyonnais de post-hardcore, blak metal et sludge nous offre. Les quatre membres du groupe ne sont que des silhouettes anonymes sur fond rouge et noir, et ils portent tous des lampes torches rouges sur le front. Cela crée un effet assez amusant et énigmatique, entre troisième œil et hommes-taupes, cela convient fort bien à un show nocturne, néanmoins après quelques morceaux cela devient un peu lassant. De même que leur musique m’étourdit rapidement, elle nécessite une écoute assez exigeante et au-delà de minuit j’ai un peu de mal à encaisser les vagues de post-black qui déferlent sur nous. La fatigue l'emporte sur l'envie de jeter une oreille à Denez pour le dernier créneau du jour, et je préfère être à peu près en forme le samedi. À suivre !
 
Critique : Elise Diederich
Date : 19/8/2022
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