Interview

AQME (2017) - Vincent Peignart-Mancini (Chant) et Etienne Sarthou (Batterie)

C’est à l’occasion de la tournée pour l’album éponyme AQME, que j’ai rencontré Vincent Peignart-Mancini (chanteur) et Etienne Sarthou (batteur) en ce samedi 18 novembre au Jas’Rod des Pennes-Mirabeau.

L’album est sorti le 22 septembre, vous avez commencé la tournée de suite, ça va donc faire deux mois maintenant, quel en est l’accueil du public ?


Vincent : Alors, sur l’album on a un très bon retour, on a été nous-mêmes surpris de cet engouement autour de l’album, déjà, on va dire la version mise sur cd et puis en live, bien les nouveaux morceaux ont fait forte impression et le fait qu’on ait déjà fait deux clips sur « Tant d’années » et « Rien ne nous arrêtera » et qu’on ait sorti « Refuser le silence » en exclusivité sur le net, on voit que le public s’est déjà approprié les morceaux puisqu’il chante, ils sont à fond et ça c’est vraiment super agréable ! C’est différent de « Dévisager Dieu » ou on sent effectivement aussi bien un engouement en live qu’en CD !

Etienne ?

Etienne : C’est vrai, les gens participent probablement plus en concert sur ces morceaux là que sur les morceaux du précédent album… Même si « Avant le jour » reste un des « tubes » que les gens chantent bien volontiers avec nous, mais là c’est vrai qu’il y a plein de morceaux ou les gens chantent vraiment, et ça c’est super quoi, c’est hyper agréable, c’est une sensation vraiment géniale sur scène ... d’avoir les gens qui font les chœurs, on a plusieurs centaines de choristes devant nous…

Oui j’ai vu ça lors de votre concert à la Maroquinerie (le 4 novembre à Paris), c’était assez fantastique ….

Vincent : Fantastique oui… Et vu de la scène, c’était assez impressionnant … très impressionnant même !

Une question concernant un plus Vincent maintenant : Cette année, vous avez fait une tournée internationale avec The Butcher’s Rodeo, il y a eu la tournée anniversaire des 15 ans de « Sombres Efforts », puis la sortie et le début de la tournée d’ « Aqme », tu travailles toujours, tu as une vie privée aussi quand même …

Vincent : Oui, oui effectivement, puis je vais avoir un petit bébé !! Parce que je trouve qu’il n’y avait pas assez de choses dans ma vie en fait (rire)

C’est ça !! Justement, comment fais-tu pour tout gérer et où puises-tu toute cette énergie ?

Vincent : Je suis entouré de gens formidables qui me donnent envie de me dépasser… voilà ! Tout simplement !

Etienne : et puis il est fatigué tout le temps ! (rire)

Vincent : Ouais puis ma phrase préférée c’est « Comment ça va ? ouais, je suis fatigué » voilà ! (rire général)
Mais globalement, je m’en sors bien ! Bon, je commence à avoir des problèmes de santé mais on ne va pas trop en parler …

Etienne : il va le payer un jour !!

Vincent : haha, je crois que je commence à le payer, ça y est !! Mais c’est cool !!

Etienne : Nous on est tous admiratifs de l’énergie qu’il arrive à avoir ! Parce que je pense qu’aucun d’entre nous ne serait capable de tenir le choc ! (bon on est plus vieux nous, aussi) ! On va voir comment il va gérer ça quand il aura son gamin vu que ça va lui rajouter une source de fatigue supplémentaire… et Charlotte et moi on a des enfants … pas ensemble, je vous rassure … (fou rire général) …quoique…..et carrément, ça nous a épuisé ces deux-trois dernières années… donc lui le rythme de vie qu’il a et avec un enfant … c’est moi qui vais rigoler !! (rires) non, mais ça va être assez terrible, je pense, mais il va gérer ça comme il le pourra !

Vincent : Je pense que oui, ça va être fatiguant mais ça va être une nouvelle source d’énergie pour moi ! En tout cas de me dire que j’ai envie de me dépasser pur un petit bonhomme, tu vois ! Et oui, j’y pense déjà alors qu’il n’est pas arrivé et ça me fait drôle donc, ça va être cool ! Voilà, on va faire des belles chansons sur mon fils (et Vincent se met à chanter un « Je t’aime mon fils !!)

On va aborder un sujet peut-être un peu plus délicat, cela fait maintenant cinq ans que Thomas, le précédent chanteur est parti. Pourtant on entend encore dire « Aqme, sans Thomas, c’est plus pareil…. » Alors que soyons honnêtes, musicalement, il n’y a pas eu de changements massifs… La seule chose qui a effectivement changé, c’est les paroles, forcément, Qu’avez-vous envie de répondre lorsque vous entendez ça ?

Vincent : Euh… qu’est-ce que j’ai envie de répondre à ces gens-là… A qui, apparemment Thomas Thirrion manque beaucoup … Bien j’ai juste envie de leur dire, qu’ils pensent bien ce qu’ils veulent et s’ils veulent continuer à suivre l’entité Aqme, on est là, nous on fait ce qu’on aime et on prêche notre paroisse et on ne se pose pas de questions de ce genre là …Moi, je suis admiratif de ce que Thomas a fait dans Aqme, il a décidé de partir, je lui ai succédé et je prends un pied d’enfer dans ce groupe et ça touche qui ça peut toucher ! Et puis si ça touchait tout le monde, je serai milliardaire et on ne serait pas là ! (rire)

Etienne : c’est normal que ce soit un peu différent ! Un chanteur c’est hyper important ! Thomas a une forte personnalité, c’est assez normal qu’il y ait des gens qui préfère une version ou l’autre version du groupe, enfin, je trouve ça assez légitime ! Maintenant, on ne peut que continuer parce qu’on prend du plaisir et que surtout ce que l’on fait aujourd’hui, c’est toujours autant du Aqme qu’à l’époque où Thomas était encore dans le groupe ! C’est pour ça que quand on a intégré Vincent, on n’était pas sûrs de continuer, après la tournée de « Epithète, Dominion, Epitaphe », tu sais quand on a commencé à bosser sur « Dévisager Dieu », on a vu que les morceaux, c’était encore du Aqme, et pas un autre groupe ! Sinon on n’aurait pas continué. C’est forcément une évolution du groupe, mais c’est toujours le même groupe. Il y a même des gens qui sont étonnés de retrouver un côté mélodique aussi fort sur le nouvel album, qui leur rappelle les précédents et je trouve ça assez cool d’avoir réussi à faire ça avec un nouveau chanteur, avec une nouvelle équipe. Tu vois, pour moi la boucle est bouclée. Il y aura juste plusieurs périodes dans la vie du groupe et c’est probablement ce qui nous rendra (j’espère), dans quelques années, encore plus intéressants ou intrigants mêmes pour les gens… qu’un groupe comme ça ait su réussir artistiquement et durer aussi longtemps avec les changements et en même temps rester toujours le même groupe malgré les changements… c’est évoluer tout en restant à peu près pareils, c’est un peu toujours ce qu’on a fait et le jour où on se dira qu’on ne fait plus du Aqme on arrêtera, on fera autre chose …

Vincent : Et moi j’en profite pour remercier tout ceux qui ont continué à écouter du Aqme, qui ont passé le cap et qui ont continué le chemin avec nous, pour eux c’est cohérent et ça va de l’avant, oui…

Etienne : Et d’ailleurs (heureusement), il y a des gens qui préfèrent Aqme avec Vincent qu’avec Thomas et c’est normal d’ailleurs, il y a deux voix différentes, c’est logique et je trouve en plus que l’interprétation des titres de Thomas par Vincent, est complètement naturelle et honnêtement, autant au début ça lui a peut-être pris un petit peu de temps avant de s’approprier certains morceaux, mais aujourd’hui, moi qui suis spectateur de ce que les deux chanteurs ont fait, j’ai totalement l’impression de jouer dans le même groupe. La musique dépasse les individus eux-mêmes, ces morceaux là, ils ne nous appartiennent plus en fait. N’importe qui peut les interpréter, bien les faire ou les massacrer (haha) et nous aujourd’hui on les fait bien (rire général).

Vincent : Bein heureusement !!

En parlant des textes justement, j’ai le sentiment que par rapport au précédent album, les textes sont peut-être plus personnels, plus touchants également. Comment l’expliquez-vous ?

Vincent : En gros quand on a commencé à composer « Aqme », j’ai écrit de manière un peu plus négative. Je n’ai jamais aimé écrire sur moi, donc j’écrivais négatif sur ce que j’écris en général, tu sais, ce qu’il y a autour de nous, ce qu’on peut raconter de la vie de tous les jours et tout et avec Etienne, on faisait un constat en se disant : « est-ce que ça ne serait pas le moment de faire des textes un peu plus introspectifs ? » Parce que peut-être que tu vas arriver à toucher quelque chose en toi, que tu n’as pas encore exploré avant et effectivement, cela m’a fait du bien de raconter, de chanter certaines histoires et il ya plein de gens qui m’écrivent pour me dire que ça les touche eux aussi et ils arrivent à retrouver une part de leur vie, y compris des choses tristes malheureusement. Et ça me touche aussi… Comme quoi tu vois, on est comme tout le monde …. C’est vrai que c’est un exercice hyper dur mais auquel on prend énormément de gout, parce que quand c’est abouti, c’est beau !

Etienne : et pour le coup, faire de notre musique une forme d’introspection personnelle et que celle-ci puisse toucher les gens, c’est dans l’ADN même du groupe, on a toujours fait ça, on a toujours eu ce mode d’expression là dans le groupe, donc c’est vrai que c’était hyper important de retrouver ça et je trouvais que Vincent gardait parfois une trop grande distance avec ce qu’il racontait dans le précédent album sauf sur certains textes comme « Avant le jour » (comme par hasard c’est une des titres les plus marquants). Puis lors d’une discussion sur le sujet, un jour, je lui ai dit : « Si ton texte ne me touche pas moi, il n’y a aucune raison qu’il touche des gens qui ne te connaissent pas ». Donc à partir du moment où il a commencé à écrire des textes qui nous touchaient nous, là c’était bingo ! Et c’est là qu’on a senti que c’était encore plus Aqme que l’album précédent. Puis comme on parle de sujet qui sont les sujets de toute la musique moderne depuis 50 ans : l’amour, la mort, la vie tout ça, c’est des sujets qui touchent tout le monde et nous on exprime ce que nous vivons, ce que l’on ressent etc… Et tant mieux si on exprime des choses qui touchent les gens et en plus si on le fait avec la manière, le choix des mots qui touche aussi les gens, ça ce n’est pas facile, il faut le fond et la forme, comme dirait un grand auteur (haha)… (« Le fond et la forme », titre de Lofofora)

Il me semble que vous n’êtes pas touts sur Paris, (Charlotte est à l’autre bout de la France, si je ne me trompe pas), Comment se passe la composition de l’album dans ce cas ?

Etienne : Alors en fait, j’arrive avec la plupart des morceaux depuis un petit moment donc, bon après on échange beaucoup avec Charlotte, on lui envoie le morceaux, on lui propose des lignes de basse on lui envoie des partitions, on bosse etc, elle vient nous voir à Paris pour répéter les morceaux tous en groupe. Elle bosse aussi énormément de son côté, ça c’est hyper important ! On a mis un petit moment avant de trouver un fonctionnement qui marche, qui corresponde à tout le monde mais là, honnêtement, ça se passe vraiment super bien, oui depuis la composition de cet album là en fait. En gros, on a trouvé une forme d’harmonie qui est vraiment bien, c’est vrai que Vincent est rentré dans le groupe, peu de temps après Charlotte a déménagé à Marseille, donc on était dans une période un peu de flou à ce moment là et il fallait qu’on repense tout l’équilibre du groupe en fait, notre manière de bosser, notre manière de voir notre relation entre nous. Et là, depuis la composition de cet album, on s’est tous libérés et on est plus unis que jamais là, franchement c’est une période très très agréable, c’est hyper chouette !

Ca se ressent sur scène d’ailleurs…

Etienne : Oui, sans aucun doute, c’est difficile de tricher sur scène … tu peux tricher avec les gens qui ne te connaissent pas très bien, mais les gens qui t’ont vu plusieurs fois sur scène, ils le savent …

Vous nous offrez un duo avec Reuno de Lofofora, on sait que pour Aqme les duos sont plutôt rares. D’où vous est venue cette idée ? Comment ça s’est passé ?

Vincent : Alors le morceau « Rien ne nous arrêtera » est un des premiers morceaux qui a été apporté dans la composition de l’album, c’est un truc sur lequel pendant un an, je pense, voire un an et demi e n’ai rien écrit, parce que ça ne m’inspirait pas du tout, et puis un jour je m’y suis collé, je me suis dit « Allez, je m’y mets », puis en écrivant les paroles et en ayant la mélodie de la voix en tête bien, j’entendais la voix de Reuno sur le couplet et sur le refrain avec moi, puis en arrivant en répèt un jour, j’ai dit au groupe, ça ne vous dirait pas un petit duo .. mais genre avec Reuno … et là Etienne était à fond : « Putain, ouais ! Vas-y appelle-le, appelle-le ! » Tous les jours, il m’appelait en me demandant si je l’avais contacté, j’ai mis deux semaines avant de le faire, parce-que je pensais que j’allais me prendre un gros râteau, et en fait pas du tout ! Je lui ai dit : « On a fait une chanson avec Aqme et en fait j’entends ta voix ! Donc on aimerait faire un duo ! Il m’a répondu : « Dis comme ça, je ne vois pas comment je pourrais refuser … Donc envoie-moi le morceau et on en parle ! » Je lui envoie le morceau et il m’a répondu direct « Tain, chant-mé, ok ! » …

Etienne : « en fait c’est de la merde, mais comme t’es un copain, je vais le faire … » (rires du groupe)

Vincent : non mais voilà, en gros il a accepté, puis après on s’est revu en studio, lors de l’enregistrement de l’album, il a écrit le pont puis à remanier un petit peu son couplet, il est venu et a posé sa grosse voix... et … c’était super… ça sentait bon là-dedans, comme on dit !

Etienne : on a toujours été très copains avec les Lofo , au début du groupe, on a beaucoup ouverts pour eux en concerts, eux étaient en train de sortir « Le Fond et la Forme » et nous on sortait « Sombres Efforts » et du coup, oui c’est hyper cool de pouvoir partager ça avec lui c’est une forme de boucle qui est bouclée, là dedans aussi ! C’est chouette ! Maintenant il ne reste plus qu’à refaire des dates ensemble !! Ca serait trop bien !

On va reparler un peu des Butcher’s. On a appris il y a quelques semaines que Kwet (guitariste) et Thomas (batteur) allaient devoir quitter le groupe…. Rassure-nous, ce n’est pas la fin des Butcher’s Rodeo ??

Non, ce n’est pas la fin des Butcher’s, il en faut plus pour détruire les Butcher’s Rodeo ! Ca fait partie de la vie d’un groupe, parfois les chemins, même des meilleurs coéquipiers peuvent se séparer pour faire d’autres choses. On n’aspire pas toujours à la même chose dans la vie et ça en fait partie …

Etienne : tu sais, c’est un groupe de bons copains et ils se mettent aussi souvent sur la gueule les Butcher’s, si je peux me permettre, (se tournant vers Vincent) ça fait partie de votre vie à vous et à un moment il y a des trucs qui peuvent péter comme ça... quand tu as cinq caractères de cochons (enfin de bouchers, pardon) qui cohabitent, il y a un moment ou ça part en cacahuètes, mais ils retombent sur leurs pattes !

Vincent : oui, c’est vrai et puis tu as beau être les meilleurs amis du monde ce que tu sèmes pendant des années, comme le disait Etienne, que ce soit en bastons ou en engueulades, ça a forcément des répercussions un jour et je pense que c’est juste la somme de plein de choses comme ça, à droite, à gauche qui font qu’aujourd’hui nos chemins se séparent… Mais c’est pas grave, on se retrouvera et on boira des bières comme on a toujours su le faire ! Parce qu’à la base, c’était parti de ça !

Vous qui avez, quelques années d’expérience dans le milieu, que pensez-vous de la scène metal en France ?

Etienne : … vaste sujet !

Vincent : oui, c’est clair ! Ca dépend des jours ! Haha !

Etienne : c’est vrai ! il y a du bien et du moins bien, le bien c’est qu’il y a encore des groupes, que les groupes en français marchent de mieux en mieux, à nouveau ! Je trouve qu’il y a un vrai retour ! Un retour des groupes de metal/rock chanté en français, après avoir eu quelques années de mode en anglais, là c’est à nouveau le français qui tire la corde ! Par contre… il y a quand même moins de groupes qu’avant … Il y a quand même beaucoup de groupes qui ont arrêtés, et quand tu as autant de groupes qui arrêtent, ça veut dire que les situations pour les musiciens sont difficiles … c’est difficile de vivre de la musique, c’est bien plus difficile qu’avant. Il y a de gros évènements, mais il y a moins de tournées de groupes par ailleurs. On a l’impression, par exemple, que les gros festivals te bloquent deux mois de l’année : le mois de mai/juin durant lesquels plus personne n’est programmé en salle de concert parce que tout le monde a peur de ne pas les remplir à cause des festivals… Donc on est encore en transition, je pense, dans le monde de la musique dans son ensemble, on ne sait pas encore où on va là … il y aura toujours de la musique pour exister mais tout change très vite. En plus, aujourd’hui avec internet, il y a moins de courants qui s’installent sur une longue durée, tu as l’impression que tout est à la mode en même temps, les années 80, les années 90, même les années 70, tout est à la mode en même temps et finalement, ça va être quoi les années 2010/2020 ? Juste un retour en arrière sur toutes ces années là ? Ou alors, est-ce qu’on va essayer de créer la musique de demain ? Je suis un peu partagé, je ne sais pas encore … Comme je le dis souvent en interview, j’attends avec impatience, le groupe qui, comme Nirvana avec trois accords et en étant sapés n’importe comment, va ringardiser dix mille autres groupes qui existent déjà sur la planète et nous ringardiser nous, d’un seul coup ! Je sais que ces sentiments là, je les ai eus quand j’étais gamin, puis ado, puis jeune adulte et là, ça fait quelques années qu’il n’y a pas un groupe qui arrive et qui change la planète, ça c’est un peu étrange ! Ca fait 10-15 ans qu’il n’y a pas eu ça ! Donc j’attends le moment ou ça va revenir parce qu’il faut des moments de rupture comme ça ou ça part en cacahuète ou tout le monde se dit : « En fait je suis sapé comme un nul, je fais de la musique de merde ! Faut que je change tout ! » Et ça c’est des moments pourtant super, parce que ça créé auprès de tout le monde une envie de réagir, de faire de nouvelles choses et ça c’est génial ! Quand le néo-metal est arrivé, dans le milieu des années 90 tout le monde d’un seul coup s’est sapé en rappeur, et le metal dans son ensemble est passé de fute noir cuir, serré, etc à, d’un seul coup tout le monde en baggys ! Ca c’est quand même exceptionnel ! Pourtant, maintenant à nouveau, les baggys sont ultra-ringards ! Donc j’attends le moment ou ça va revenir à la mode et comme dirait un autre auteur : où la routourne va tourner quoi ! (rires général)

Vincent : Et puis de mon côté, pour avoir évolué sur les deux tableaux, c’est-à-dire aussi bien avec Aqme, un groupe qui confirme sa notoriété et avec qui on arrive à remplir de belles salles avec pas mal de monde et Butcher ou c’est assez aléatoire, même si ça commence à devenir vraiment bien, tu te rends compte qu’aujourd’hui, avec tous les réseaux sociaux, les gens ont les yeux partout et nulle part à la fois et du coup ils n’arrivent plus à suivre un groupe, comme il y a eu Aqme il y a 18 ans ou et c’est compliqué en fait ! On est plus devenu de la consommation …

Etienne : C’est pour ça qu’il y a eu probablement aussi moins de mouvement collectif ! Avec une scène qui se créée avec plusieurs groupes et qui d’un seul coup, dans les cours de lycées, bein t’as plus que des metalleux ou t’as plus que des rappeurs. C’était dingue ce qui se passait à l’époque dans les années 90 !

Vincent : Il y a un espèce de fossé qui s’est construit entre, un milliard de groupes qui sont dans un espèce de climat de consommation où tu te dis « J’aime bien ce groupe, j’aime bien les Butcher’s aujourd’hui, puis demain j’écoute autre chose et après-demain encore autre chose », tu vois ! Puis, il y a les autres groupes comme Metallica, les Gun’s and Roses, qui vont faire des stades avec des trucs à 100-150 balles l’entrée, qui eux, resteront ! Tu vois, c’est encré, c’est là quoi ! Et au milieu, il n’y a rien ! Soit t’es un petit groupe, soit t’es un énorme groupe ! C’est hyper compliqué !

Etienne : C’est aussi pour ça qu’il y a une petite partie de la scène musicale qui a disparue, les « gros » sont plus gros que jamais et tout ce qui est plus raisonnable en terme de succès, clairement ont eu des difficultés ! Mais il y en a plein qui s’en sortent très bien aussi ! Nous d’ailleurs on est toujours là et il se passe plein de choses positives autour de nous. Mais je comprends qu’il y ait des groupes qui arrêtent, comme ETHS qui a arrêté cette année, je comprends qu’à un moment, toute l’énergie que tu mets à faire ta musique, à la bosser, à l’enregistrer, à faire des milliers de kilomètres sur la route pour un concert, quand tu n’es pas récompensé vraiment à 100% de tes efforts, c’est dur ! C’est du temps passé que tu ne passeras pas avec ta famille, avec tes proches, ce n’est pas toujours très équilibrant comme vie, donc je comprends qu’il y ait des gens qui raccrochent …

Vincent : Avant aussi (bon, je ne veux pas parler du système), mais il y avait plein de situations qui permettaient quand même de défrayer les groupes et qui permettaient de s’offrir des cachets et puis vivre de l’intermittence finalement... Mais, aujourd’hui vivre dans l’intermittence, ou en tant que musiciens dans le style dans lequel on évolue, c’est la croix et la bannière … donc, on a tous un travail à côté et effectivement quand tu fais des bornes et des bornes pour parfois des choses qui sont un peu limites, bein il faut avoir la foi !

Donc vous avez peut-être quelques conseils à donner pour les groupes émergents ?

Vincent : Oui !

Etienne : Garder la foi justement !

Vincent : Allez travailler puis tout l’argent que vous allez gagnez, investissez-le dans votre groupe et ne vivez pas ! (fou rire)

Etienne : Heureusement, il y aura justement toujours des histoires pour démontrer le contraire de ce que l’on vient d’expliquer ! Il y a toujours des histoires ou d’un seul coup un groupe qui arrive de nulle part cartonne en ayant tout fait tout seul, je pense notamment à un groupe de rock français qui s’appelle Last Train, c’est hallucinant ce qu’ils font depuis 3-4 ans, ils font tout tous seuls ! Ils ont fait 150 à 200 dates par an, en les bookants tous seuls ! Résultat au bout de 3 ans, ils se sont retrouvés sur tous les festivals d’été les plus gros, que ce soit le Rock-en-Seine, jusqu’à Arras, ils ont fait un truc de dingue ! Les mecs ont réussi à remplir des grandes salles en ayant fait un seul EP ! Donc il y a toujours des histoires incroyables ! Mais c’est vrai que l’investissement, quand avant tu donnais de ta personne, bein maintenant tu dois donner 10 fois plus ! Et au sein d’un groupe, il faut être à la fois web-master, communiquant, savoir faire la musique, être manager… en fait, il faut avoir même 10 métiers dans le même groupe ! Alors qu’auparavant, tu pouvais avoir plein de gens qui t’aidaient, aujourd’hui il faut savoir tout faire tout seul ! Donc c’est ultra exigeant pour les gens et c’est vrai que pour les quelques-uns qui arrivent à s’en sortir, c’est admirable et ces gens-là font un boulot de dingues. Mais il n’y en a quand même pas beaucoup qui arrivent à faire ça et c’est normal ! Donc le seul conseil que j’ai à donner c’est de s’accrocher et de croire en ce qu’ils font ! Il n’y a que ça de vrai ! Nous si on continue, c’est parce qu’on aime ce que l’on fait et qu’on y prend du plaisir ! Il n’y a que ça qui compte !

Vincent : Oui ! Et tu sais, nous à notre niveau, les moments où l’on se fait mal, c’est quand on commence à regarder qui fait quoi ! Et ça, ça fait du mal ! Alors moi j’ai un conseil à donner, aussi bien pour nous que pour tout le monde : restez focalisés sur votre groupe, travaillez pour votre groupe, travaillez pour que cela fonctionne et ne regardez pas ce qu’il se passe autour ! Ou bien, ne prenez que les infos utiles ! Ne vous prenez pas la tête avec du « J’aimerais être comme lui, ou faire comme lui ! Concentrez-vous juste sur vous ! Bossez, bossez et bossez ! Et on ne sait pas ce qu’il va se passer demain ! On ne sait jamais ! Desfois, à trop attendre, on se fait plus de mal qu’autre chose alors que si tu bosses et que ça aboutit à quelque chose, ça sera la plus belle des récompenses qui pourra t’arriver !

Etienne : Et pour tous ces moments, la finalité, c’est quand même de prendre du bon temps ! On est là, avec une bande de copains, on s’amuse, et même quand on se fout sur la gueule, bein à la fin faut quand même qu’on s’amuse ! Si les gens qui font de la musique aujourd’hui n’ont pas de plaisir, alors il faut arrêter ! Il faut continuer juste parce que c’est un kiffe ! Si la part de galère est plus importante que la part de plaisir, faut savoir dire stop. Ou alors il faut s’accrocher encore quelques années et voir comment ça évolue, mais il faut quand même prendre plus de plaisir que de gamelles, quoi, sinon, ce n’est pas drôle !

C’est sûr ! Et la suite pour vous, c’est quoi ?

Etienne : Alors là, on va faire une mini-pause début d’année et on redémarrera les concerts fin mars, début avril et puis bein, continuer les concerts, défendre notre album ! On va essayer de faire des projets images pour le coup, probablement un autre clip, peut-être même encore un autre, on va

essayer de bosser de l’image pendant la période où nous n’auront pas de concerts donc entre janvier et mars, on va essayer de proposer du contenu, du contenu artistique aussi, on va voir…

Vincent : on a des idées oui, on sait qu’on va se voir chez nous, à la maison, tranquillement et on va pouvoir créer… ce qu’on aime faire aussi ! Puis proposer de nouvelles choses, c’est ça qui est le plus intéressant, proposer des choses encore à partager avec les gens !

Et bien, on arrive à l fin de cette interview, je vous remercie encore pou le temps que vous m’avez accordé !

Vincent : c’est nous qui te remercions parce que sans toi, nous n’existerions pas ! Et c’est vrai en plus !!

Etienne : Tout le monde contribue à ce que les groupes comme nous, existent !

C’est vrai …. Je vous laisse le mot de la fin !

Etienne : Bein merci ! C’est déjà pas mal comme mot de fin !

Vincent : Oui, Merci ! Merci, merci d’être là ! Puis comme je le dis toujours aux gens : Une fois que vous avez lu cette interview, que ce soit sur le net ou dans un bouquin, fermez le livre ou éteignez votre ordinateur et bouge-vous en concert parce que c’est là que se passent les plus belles choses !!

Etienne : Moi j’ai un autre mot de la fin : elle était très bien ta première interview Anaïs ! (rire général puis applaudissements)
 
Critique : Anais
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